Notre recherche de la vie extraterrestre ne commencera pas par l’interview d’un astronaute à la retraite ou par un reportage dans les labos de la Nasa. Non. Notre enquête débutera dans un lieu inédit qui nous réservera bien des révélations. Un endroit où tout est possible, à commencer par les légumes à volonté : le Flunch.

Celui de Brest dans la zone Kergaradec pour être plus précis. C’est là que nous avons rendez-vous avec les membres de l’association “Vigie Ovni 29” qui, tous les deux mois, s’y réunissent pour « un repas ufologique ». En ce samedi soir, ils sont cinq. Il y a un ancien gendarme, une aide-soignante, un retraité… Tous âgés de la quarantaine et plus.

Si j’ai de mon côté choisi la formule entrée-plat-dessert avec une assiette de taboulé, une galette complète et une part de tarte au citron, Gilles, le secrétaire de l’asso, a quant à lui opté pour un plateau froid : piémontaise et assiette de charcuterie.

« Un ovni sorti d’un menhir »

Ce grand gaillard à l’allure de bucheron et à la barbe druidique est l’un des membres les plus actifs. « Je consacre toutes mes journées aux ovni. Je ne fais que ça », raconte cet ancien technicien en tour de contrôle qui, depuis les années 70, se passionne pour la question ufologique. « Quand on est dedans, c’est dur d’en sortir. Il y a toujours de nouvelles choses, de nouveaux témoignages… »

Après plus de quarante années de documentation, d’enquête et d’observation, Gilles n’a plus le moindre doute sur une quelconque existence alien. « J’ai bien sûr aperçu plusieurs soucoupes volantes, des objets n’obéissant pas à une physique conventionnelle, des engins en vol stationnaire capables de s’envoler et de disparaître en moins d’une seconde, raconte-t-il avant de sortir son classeur de photos. Ça, c’est un petit ovni d’environ 20 cm sorti d’un menhir. Et c’est pas un montage ! J’ai juste retouché la luminosité sur l’ordinateur pour qu’on le voie mieux. »

Avec Anne, sa femme, il affirme avoir vécu des expériences à ce jour inexpliquées mais d’origine extraterrestre. Comme cette histoire arrivée en 1975. « On venait de faire Orléans-Brest en voiture. Mais en regardant nos montres à l’arrivée, on s’est rendu compte qu’on avait fait le trajet en quatre heures, alors que d’habitude on mettait près de six heures ! On se souvient d’avoir passé Rennes et Guingamp, mais pas Saint-Brieuc. Juste le souvenir d’un grand flash. Si nous avons été téléportés ou enlevés par des extraterrestres ? Sans doute. »

À l’origine des repas ufologiques brestois : Thierry Larquet, un retraité de la SNCF, qui traque lui aussi les soucoupes. « En tout, j’en ai vu une dizaine. Pour certaines, j’ai même des photos (voir ci-dessus). » Mais son principal fait d’arme reste cette soirée de 2007 à Saint-Renan dans le Finistère. « J’étais en observation près du menhir de Kerloas, un site très actif, le menhir devant servir de balise pour les ovni. Là, j’ai senti une présence. à une dizaine de mètres de moi, il y avait une entité en train de traverser le champ. Un grand lézard de deux mètres de haut. Ce qu’on appelle un reptilien. Je pense qu’il ne m’a pas vu. Depuis, je ne retourne plus là-bas, trop dangereux… »

Un excentrique ce Thierry, pensez-vous ? Certainement. Il a cependant fait partie pendant quelques temps de l’équipe des IPN (Intervenants Premier Niveau) du Geipan. Le Geipan ? Le Groupe d’études et d’informations sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés, un organisme du très officiel Cnes (Centre national d’études spatiales). Sa mission est d’expliquer tout ce qui peut paraître étrange dans le ciel.

« Nous pouvons vivre en paix avec eux »

« Pour mieux couvrir le territoire, on avait commencé à travailler avec des ufologues privés en 2008, explique Xavier Passot, responsable du Geipan. À cette époque, nous avions 100 IPN, scientifiques ou non, sélectionnés uniquement sur CV. Mais deux problèmes sont apparus : le manque de sollicitations de notre part (seule une quarantaine d’IPN ont été appelés pour des enquêtes, ndlr) et la confiance limitée que l’on pouvait avoir envers ces personnes que nous connaissions mal. »

Depuis l’année dernière, cette organisation a donc changé, réduisant le nombre d’IPN à 18 (dont deux en Bretagne), tous retenus après un exercice. Les bonnes qualités d’un enquêteur-ufologue ? « Il faut mettre de côté ses croyances, rester objectif au moment de l’enquête, être un simple collecteur d’informations », répond Xavier Passot pour qui les sceptiques sur la question extraterrestre sont les plus intéressants car « ils vont plus loin dans la recherche de l’explication ».

Pour le responsable des repas ufologiques brestois, qui n’avait pas postulé pour les nouveaux IPN, il n’y a plus d’incertitude. « Au départ, j’étais sceptique. Mais aujourd’hui, impossible de l’être avec tout ce que nous collectons sur le terrain ou sur Internet. » Comme la plupart de ses homologues, Thierry passe énormément de temps sur le Net. « On y trouve beaucoup de choses fausses mais aussi toute la vérité », estime Gilles. Les plus acharnés rendent compte de leurs enquêtes sur des forums spécialisés. C’est le cas de Claude, une Morbihannaise de 63 ans, membre du forum Ovni-Ufologie.com. « Ce qui m’intéresse, c’est d’étudier les observations. C’est comme une énigme à résoudre. Ça peut être un effet météorologique, un astre et pourquoi pas une soucoupe. Je me considère plus dans la recherche que dans la croyance. »

Auteur de l’ouvrage Les Ovni du Cnes et collaborateur du Laboratoire de zététique à l’Université de Nice, Éric Maillot jette un regard froid sur ces ufologues amateurs. « Le manque d’infos, le mythe soucoupique, l’influence de la SF, l’envie de croire expliquent leur engouement. Même sur un phénomène inexpliqué, rien ne leur permet d’affirmer qu’il s’agit d’extraterrestres. Pourtant, ils le font… »

« Quelqu’un qui voit quelque chose qu’il considère comme étrange peut avoir un choc émotif et basculer dans la croyance, poursuit le patron du Geipan. Quand on lui explique qu’il s’agissait d’un phénomène banal, comme le passage de la station ISS ou une lanterne thaïlandaise, il se peut alors qu’il conteste nos conclusions. »

Pas de quoi faire douter nos ufologues convaincus pour qui la vérité sur les aliens n’est qu’une question de temps. « Avec toutes les preuves que nous avons, c’est pour bientôt, affirme Gilles. Le contact extraterrestre a certainement déjà eu lieu avec les personnes prêtes à les accueillir. S’il faut avoir peur ? Bien sûr que non. Nous pouvons vivre en paix avec eux. »

Julien Marchand
Paru dans BIKINI#12