03h20 « Nan mais Mogwai, d’t’façon c’est du réchauffé. » Le monsieur dans la foule qui intervient à beau être saoul, il a raison. Les Écossais sont déjà passés au Fort de Saint-Père. C’était en 2006, le soir de Grizzly Bear et de Calexico, entre autres. Et c’est vrai qu’il a un petit goût de réchauffé ce concert, en plus d’être assez moyen. Dans le genre instrumental, on préfère les Texans d’Explosions in the Sky. Sans rancune guys. On zappe jusqu’au concert suivant, Suuns, et là au moins on prend du plaisir. C’est peut-être « totalement pompé sur Clinic », comme nous l’affirme notre voisin, au moins les Montréalais assurent niveau rock expérimental bien rythmique mais accessible. Tout l’inverse de la légende Aphex Twin, qui clôture cette première soirée sous un déluge de basses ultrapuissantes. On veut bien être réceptif, mais là le gars, qui « a grandi entre un bunker et un sous-marin » aux dires d’une fan, nous balance ses ultrasons dans le cornet sans prévenir. C’est clairement pour les initiés, même si à force de rester devant la scène, on finit par apprécier. Magie de la musique ou goûts musicaux pénétrables au moindre concert qui passe ? On choisit la deuxième option. Direction le camping pour passer la nuit avant un deuxième jour prometteur, qui se conclura par The Kills et Battles.

Suuns

Etienne Jaumet

22h45. Ah oui, on avait oublié de vous parler des Anglais. Ils sont là. En nombre, comme d’hab’ à La Route du Rock, tout juste débarqués du ferry. On les avait croisés en début d’après-midi intramuros. Il était à peine 13h et on en voyait dans les pubs, face à leur seconde pinte, la défunte première finissant tout juste de glisser sa mousse dans le fond du verre. RIP. Au camping aussi, ils sont là, fidèles au poste. L’aubaine. « C’est les vacances ! », baragouine un gars qui aurait bien besoin de Biactol, canette en main, expliquant, si on a bien compris, qu’avec une pareille programmation, c’est valable pour tout amateur de rock indé qui se respecte de traverser la Manche. Vu les tarifs des festivals pratiqués là-bas, on comprend.

Nous, on se contente de traverser les quelques centaines de mètres qui séparent notre futur sleeping-room du site pour assister au concert de Sebadoh. Le trio, associé à la scène ricaine 90’s au même titre que Dinausor Jr ou Pavement, sert un rock ultraspeedé, avec des morceaux durant max deux minutes. Marrant, on s’imagine bien au bal de prom’s du lycée de Sauvé Par Le Gong, accompagné de Zach, Scritch, Slater et les filles, face au groupe-phare du lycée jouant sur l’estrade. Sauf qu’il joue juste. Et que ses membres ont un bon 40 balais. Bassiste et guitariste échangent de rôle en fonction des morceaux, idem avec le micro. C’est old school.

Place ensuite à nos petites favorites, les quatre jolies jeunes filles d’Electrelane qui, si vous avez bien révisé votre Bikini #2, se sont reformées cet été après quatre ans d’arrêt. Depuis 2007, rien n’a changé ou presque, et c’est tant mieux. La chanteuse Verity Susman a juste laissé pousser ses cheveux. Sinon, c’est le même set, ultra efficace, largement applaudi par un public pourtant réputé exigeant. Les meilleurs morceaux, issus des albums The Power Out et No Shouts, No Calls, sont repris, avec en final la reprise de The Partisan. On a quasi envie de serrer le poing, comme un vieux syndicaliste FO. Mais non, on préfère profiter du temps mort pour aller se restaurer.

18h. « Bon bah, y a plus qu’à », souffle un gars à sa meuf – enfin, on l’imagine comme telle – sitôt son bracelet trois jours autour du poignet. Ouais mec, y a plus qu’à transformer le gros cercle que t’as dans ton dos en tente, prendre l’apéro tranquilou au camping, se diriger vers le long couloir qui file vers le fort Saint-Père et se poser devant la scène assister au premier concert de la soirée. Soit les résidents Magnetic Friends, qui ouvriront le bal les trois soirs en poussant quelques CD pour faire monter la pression.

Mais en réalité, La Route du Rock a déjà débuté bien avant. Dès le début d’aprèm, sur la plage Bon Secours, Ethel, la DJ parisienne, a offert un gentil set. Comme elle le fera pendant les trois jours. Idéal pour digérer sa galette complète prise intramuros, à quelques mètres de là. Y a même des chaises longues ! L’ambiance est plutôt marrante, avec sur la plage ce curieux mélange entre les festivaliers, facilement reconnaissables au complet jean slim/t-shirt de groupe (Joy Division, Franz Ferdinand, Architecture in Helsinki, Daniel Johnston, liste non exhaustive), et les touristes. Eux aussi, on les repère de loin : papa faussement décontract’ en polo Ralph Lauren rose, maman derrière la poussette et le fiston qui s’amuse à balancer ses sandales en direction des mouettes, se faisant rappeler à l’ordre par la daronne. « Huuuuugues ! Reviens ici tout de suite !! » Ah ouais, on avait oublié, Saint-Malo est l’une des destinations préférées des Parisiens à gros porteuf.

Botibol

On préfère changer de plage et aller à L’Évantail, face au Palais du Grand Large, où l’asso rennaise La Soupe aux Shoots organisait sa cinquième édition du tournoi Foot is not Dead. Soit – vous l’aurez compris – du futchebôl sur la plage, à la cool, avec six équipes inscrites. Pas d’artistes à l’affiche, mais la prod’ du festival, des bénévoles, des médias et de « simples » festivaliers. Il manque juste la buvette et le sandwich pâté en récompense, mais on ne va pas chipoter. Juste à côté des footeux, les rugbymen du club de Saint-Père initient qui le souhaite aux mystères de l’ovalie. Une partie de Dodgeball (!) s’organise. C’est frais. En parlant de fraîcheur, la pluie menace. Déjà. Aïe.