LES GARS DE 1995 S’INSPIRENT DU MEILLEUR DU RAP OLD SCHOOL POUR S’IMPOSER COMME LA NOUVELLE VALEUR SÛRE DU HIP-HOP FRANÇAIS. SANS MAJOR MAIS AVEC INTERNET, ILS REMPLISSENT LES SALLES. KIDS ET ANCIENS DISENT OUI.

Cette année-là, NTM sortait Paris sous les bombes, Assassin son deuxième album et les Sages Poètes de la Rue déboulaient avec leur premier disque. Pour beaucoup, 1995 reste l’une des années de référence du rap français et les nineties son âge d’or. « C’est une époque où on a l’impression que les choses se faisaient spontanément, qu’il n’y avait pas trop de calculs », explique Fonky Flav’, l’un des membres de 1995 (à prononcer 1-9-9-5, un double neuf cinq ou 1995, comme ça vous botte quoi) quand on l’interroge sur le nom de son groupe.

Un nom qui depuis quelques mois fait l’unanimité dans le milieu hip-hop. Les kids kiffent, les anciens portent un œil bienveillant sur Nekfeu, Sneazzy West, Areno Jaz, Alpha Wann, Fonky Flav’ et Lo’, les cinq MC et le DJ de ce crew né dans le sud de Paris. 90 000 fans Facebook, un EP salué, des salles blindées, des articles de presse à la pelle (dont Le Monde) : une notoriété certaine qui arrive après deux années de scènes ouvertes pour cette bande de potes âgés de la vingtaine. « Dès qu’il y avait un open-mic sur Paris, on y allait. En 2009, on devait en faire deux à trois par semaine, facile. »

Les garçons ne jurent que par les samples, de préférence jazzy ou funky. Ils enterrent l’autotune et les synthés. «On prend le rap à la source, résume Fonky Flav’. Pour autant, le délire “puriste” on s’en branle. On fait juste la musique qui nous plaît : un hip-hop à l’ancienne qui, contrairement au rap ghetto, a été moins mis en avant par les radios à une certaine période. » Une différence qui se sent aussi dans leurs textes. « On n’y va pas de façon brutale. Dire “nique la police” ne nous intéresse pas. On a des morceaux engagés, mais cela passe par des rimes ou des métaphores qu’il faut aller chercher. »

Après une tournée de 25 dates à la fin 2011 (« 15 000 bornes en bagnole ! »), 1995 reprend la route en ce début d’année. Des concerts sold out la plupart du temps. Une perf’, surtout sans major, sans manager et en affichant un budget promo light. « On a fait des bêtes de salles, comme le Transbordeur à Lyon, l’Aéronef à Lille et le Bataclan à Paris où on a explosé la jauge : 1 700 personnes. » Un public que les six gars ont déplacé grâce à Facebook, Twitter et YouTube. « On nous qualifie souvent de porte-étendard de la génération indé qui a su utiliser le Net. On s’est juste servi des outils qui étaient à notre disposition. Ce n’était pas une volonté de passer à tout prix par Internet, c’est juste qu’on n’avait pas le choix. »

Si le groupe s’est dernièrement engagé avec un tourneur, il affirme vouloir rester indépendant pour le moment. «Toutes les grosses majors et maisons de disques sont venues nous voir. C’est intéressant car cela veut aussi dire que notre truc a une valeur commerciale et que, donc, on peut espérer en vivre. Mais, actuellement, on souhaite rester indé. Nous avons une politique : tout ce qu’on peut faire nous-mêmes, on le fait. Jusqu’à présent, ça nous a réussi, alors on continue comme ça. »

Julien Marchand
Photo : Iorgis Matyassy (www.iorgismatyassy.com)

Le 2 mars à l’Antipode à Rennes
Le 6 avril au festival Panoramas à Morlaix
En mai aux 3 Elephants à Laval
En juillet aux Vieilles Charrues

Article paru dans BIKINI#5