On aime ou on déteste mais les deux rappeurs, symboles du rap français couillu à l’extrême, cartonnent. Tous deux de passage en Bretagne, ces bonhommes valent-ils le coup qu’on se déplace ?

Quand on évoque le rap français en 2015, difficile de ne pas remarquer l’ascension du gars de Roubaix, Gradur, et la persévérance dans le rap game de Kaaris. Musicalement proches, assez éloignés sur le fond, les deux rappeurs divisent.

« Qu’on le veuille ou non, Kaaris apporte quelque chose au rap français, estime Ramsès Kefi, journaliste spécialisé hip-hop à Rue89. Artistiquement parce qu’il a de la technique, mais aussi cinématographiquement car ce mec est un personnage. Kaaris a compris que le rap était aussi un spectacle. »

Et puisque le hip-hop français a historiquement tendance à mettre le paquet sur les lyrics, la question des paroles se pose obligatoirement pour ces deux zigotos. « Lorsqu’on l’écoute attentivement, Kaaris est loin d’être le plus mauvais stylo à la main. »

« Des punchlines qui font sourire par leur vulgarité »

Pour Julian Colling, journaliste musique à l’AFP, « ces deux rappeurs ont des punchlines qui font sourire, pas par leur humour, mais par leur vulgarité. Pour ça, ils sont très forts, super hardcore. Le côté jusqu’au-boutiste est hyper efficace. » Une recette qui, début mars, a permis à Gradur de devenir disque d’or avec son album L’Homme au Bob, vendu à plus de 30 000 exemplaires en trois jours.

Tous deux sont adeptes de la trap, un genre qui s’est imposé dans le hip-hop. « C’est le souci que j’ai avec la scène actuelle, avoue Julian, ça uniformise les flows. Ils imitent les Américains, mais avec quinze ans de retard. Et puis, ils manquent d’autodérision. Chose qu’ont plus certains rappeurs ricains. »

Pour Ramsès Kefi, c’est le culte de la punchline qui pose problème : « Cette mode tend à affaiblir les textes. Les mecs cherchent à les empiler. Le résultat, c’est que ça donne des paroles décousues, qui perdent tout leur sens et toute leur force. Globalement, les textes de Kaaris tournent en rond (violence, argent…) et, sur certains titres, sont très limités en terme de contenu. Mais écoute-t-on Kaaris pour sa plume ? »

Brice Miclet
Photo : DR
Paru dans BIKINI #21

Kaaris : le 22 avril à L’étage à Rennes et le 23 avril à La Carène à Brest
Gradur : le 15 mai à La Carène à Brest et le 11 juin à L’étage à Rennes