Dans un château abandonné, on a suivi une équipe de ghostbusters bretons à la recherche de spectres. Un peu flippant, beaucoup marrant.

Le décor a tout de la parfaite carte postale du chasseur de fantômes. Le jour qui décline, les feuilles qui s’agitent dans les arbres et, face à moi, un château du 18e siècle aujourd’hui à l’abandon. Nous sommes à Mauves-sur-Loire, au nord-est de Nantes. C’est là qu’Astrid, Joëlle, Karl, Kévin, Nicolas et Nolwenn m’ont donné rendez-vous pour passer la soirée. Tous sont membres du collectif brestois AEPS (Association d’enquêteurs du paranormal et du surnaturel), une asso créée en 2013 et qui, une fois par mois, mène l’enquête dans un lieu qu’elle suppose hanté.

« Il y a aussi une ancienne morgue »

« Le château d’aujourd’hui, c’est un endroit où on a 99 % de chance d’avoir des manifestations paranormales. Le bâtiment a un passé chargé : il a été reconverti en hôpital au début du 20e siècle, puis en sanatorium où on soignait les tuberculeux. Il y a aussi une ancienne morgue au fond du parc. Il peut s’y passer des choses ce soir », m’avertit Astrid, 38 ans et présidente d’AEPS. À ses côtés, dans la pièce principale au rez-de-chaussée, Nicolas, Kévin et Karl installent le QG : ordinateurs, caméras, micros, détecteurs de mouvements et tout un tas de trucs à diodes clignotantes… Certains objets ressemblent vraiment à ceux de Bill Murray et sa bande dans S.O.S Fantômes.

« Ça nous arrive d’en acheter sur des sites spécialisés de “ghost hunting” mais, la plupart du temps, c’est plus du matos qu’on détourne, explique Karl. Comme le lecteur de champs électromagnétiques, un appareil dont se servent les électriciens, ou la caméra Kinect de la Xbox qui permet de filmer en infrarouge et en 3D. » En plus de ce dispositif high-tech, des poupées et jouets sont également sortis des sacs et disposés sur une table. « Des leurres si jamais des entités d’enfants souhaitent se manifester. Quand elles ne répondent pas à nos appels, ça peut les faire venir… »

« Un peu comme Whoopi Goldberg dans Ghost »

Dans l’équipe d’AEPS, deux profils d’enquêteur se distinguent vite. D’un côté, les geeks, biberonnés à Paranormal Activity et au Projet Blair Witch, à la quête d’un enregistrement ou d’une photo d’un spectre. De l’autre, « les sensibles », comme ils se définissent eux-mêmes, qui affirment avoir le pouvoir de ressentir et de communiquer avec les défunts. C’est le cas de Joëlle, 60 ans. Sa première expérience remonte à ses 19 ans. « Avec trois copines, on avait fait du spiritisme, une petite table avait décollé dans la pièce… » Depuis, elle raconte entrer régulièrement en contact avec les esprits. « Ils s’adressent à moi car ils savent que j’ai des capacités médiumniques accrues. Un peu comme Whoopi Goldberg dans Ghost. Vous l’avez vu ? Il y a beaucoup de choses vraies dans ce film. »

Pour Joëlle, les âmes avec qui elle communique sont le plus souvent celles de personnes mortes brutalement et qui n’auraient pas eu le temps de finir certaines choses dans le monde des vivants. Des esprits qui se manifestent de différentes façons. « Ils peuvent me parler, me toucher, me faire ressentir du froid ou alors apparaître devant moi. » Joëlle aurait même vu le fantôme de son père trois semaines après son décès. « Il n’était pas aussi dense qu’un être humain de chair et d’os mais je le distinguais très bien. Il s’est adressé à moi une dernière fois, avant de partir en paix dans l’au-delà. » Wow.

Lorsque l’ensemble du matériel et le groupe électrogène sont installés, la nuit est entièrement tombée. Il est 22 h et les premières expéditions s’apprêtent à commencer dans l’enceinte du château. Alors que Karl et Nico s’aventurent au sous-sol dans le noir complet, uniquement équipés de leur caméra infrarouge, Astrid et Nolwenn décident d’explorer l’ancienne morgue. « Tu viens avec nous faire un tour ? », me demandent-elles. Par peur de passer pour un mec qui a les chocottes, je dis oui.

Lampes de poche, appareils photos et enregistreurs audio à la main, on s’avance vers le bâtiment situé à l’extérieur. « Est-ce qu’il y a quelqu’un ? Manifestez-vous, venez nous parler », répète Astrid. Au bout de la cinquième fois, un craquement se fait entendre. Sûrement les arbres, un oiseau ou un renard aux alentours. Nos chasseuses de fantômes penchent plutôt pour « un signe, comme si quelque chose avait fait le tour de la bâtisse avant de repartir ».

Après dix bonnes minutes de silence et sans la moindre apparition, on regagne finalement le QG où Kévin, 32 ans, scrute les images envoyées en temps réel par les caméras. « Ça m’éclate d’analyser les vidéos et les bandes-son, même si c’est pour montrer qu’il n’y a rien de paranormal, affirme ce grand gaillard. Quand certains croient voir un fantôme, il s’agit le plus souvent d’un flash sur un grain de poussière ou de condensation sur l’objectif. Même si je crois aux phénomènes surnaturels, j’essaie de rester le plus objectif. »

« Un ensemble d’anormalités »

Une démarche qui rapproche Kévin et ses acolytes de la plupart des équipes qui se sont développées ces dernières années : EuroGhost, Recherches Investigations Paranormales, The Believers… Toutes nées dans le sillage de l’émission américaine Ghost Hunters, dont elles ont repris les principaux codes.

« Pour faire une bonne enquête, il faut d’abord éliminer toutes les explications rationnelles avant de s’attaquer aux raisons paranormales. Comme pour une enquête policière, il faut un faisceau de preuves, un ensemble d’anormalités pour prouver que l’on a affaire à un esprit », rappelle de son côté Erick Fearson, un Normand de 46 ans, chasseur de fantômes depuis plus de 25 ans. Sa méthode ? « L’utilisation de matériel scientifique, d’instruments non conventionnels comme le pendule, l’interrogation de témoins grâce à des techniques de mentaliste et mon ressenti », détaille-t-il.

S’il intervient sur demande des propriétaires qui imaginent leur habitation hantée, il affirme en revanche ne pas être payé. « Seuls les frais de route et d’hébergement me sont remboursés. Je demande juste aux gens le droit d’utiliser leurs histoires pour mes livres et conférences. » Parmi ses principaux faits d’armes, il se souvient particulièrement de cette nuit de 2010, dans la Manche, au château de Martinvast, un monument du 16 siècle devenu par la suite un hôtel. « C’était une nuit de pleine lune. Il était 2 h 30, je n’arrivais pas à m’endormir quand je me suis mis à entendre des bruits de pas dans la chambre. Et là, devant la fenêtre dont je n’avais pas tiré les rideaux, le fantôme d’un homme habillé en noir ! Au moment où j’ai allumé la lumière, il a disparu. »

Face à ces ghostbusters qui jureraient sur la tête de leur mère avoir vu un esprit, Henri Broch, directeur du très sérieux laboratoire de zététique (soit l’étude rationnelle des phénomènes dits paranormaux) de l’Université de Nice, se montre plus sceptique. « Le problème des chasseurs de fantômes, c’est qu’ils mettent la charrue avant les bœufs. Ils partent du postulat qu’un lieu est forcément hanté et vont ensuite chercher des phénomènes qu’ils prendront pour preuves. C’est l’inverse de la pensée scientifique, insiste-t-il. Une variation de température dans une cave n’a rien de surprenant par exemple, cela s’explique par la circulation de l’air. Idem pour une tâche de chaleur captée par une caméra thermique : il suffit qu’un participant se soit appuyé sur un mur et ça fausse complétement la mesure. »

« Il existe des bateaux fantômes »

Pas le genre de discours à faire douter nos chasseurs de spectres. « Aujourd’hui, la question n’est pas de savoir si on y croit ou pas puisque les fantômes sont une certitude. Les apparitions sont aussi vieilles que l’humanité. Un phénomène qui apparaît sur l’ensemble de la planète et qui touche toutes les cultures, rétorque Erick Fearson pour qui la vie après la mort ne touche pas que les humains. Il existe des bateaux, des trains et des avions fantômes. Cela s’appelle des hantises résiduelles. ça concerne aussi les bêtes. » Ce que confirme Joëlle d’AEPS. « Bien sûr que les esprits d’animaux existent. Depuis quelques mois, j’ai un petit chien qui me suit partout. » Wouaf.

Julien Marchand
Photos : Bikini
Paru dans BIKINI#20

A la recherche de la dame blanche de Plougastel

C’est une histoire qui, plus de trente ans après, est encore parfaitement connue des habitants de Plougastel-Daoulas. Une légende urbaine qui a traversé les décennies et dont les détails ressortent aussitôt qu’on l’évoque. Retour en arrière. Nous sommes en janvier 1981. Après avoir reçu plus d’une douzaine de témoignages, la gendarmerie de Plougastel décide de lancer officiellement une enquête. « Une histoire de fou », avouent les forces de l’ordre dans Le Télégramme le 10 janvier 1981. Cette histoire, c’est celle de la dame blanche du pont Albert-Louppe, l’ancien pont qui reliait Plougastel à Brest.

« Glacée comme morte »

Sa première apparition se serait produite avec un dentiste du sud-Finistère : apercevant une auto-stoppeuse habillée en blanc sur le bord de la chaussée, il s’arrêta, ouvrit la portière et la fit monter à ses côtés. « Glacée comme une morte », elle demanda au chauffeur de la déposer à hauteur du pont et lui dit : « C’est ici que je me suis tuée il y a trois ans. » Avant de disparaître subitement.

Très vite dans la ville, une rumeur se propage : il s’agirait du fantôme d’une restauratrice de Plougastel décédée au volant de sa voiture quelques années plus tôt. Un bruit qui, selon la même édition du Télégramme, gagnera également Brest où il est « colporté dans les commerces et les établissements scolaires ». Les plus fervents soutiennent la thèse de la revenante et avancent même qu’elle se manifestera désormais à chaque nouvelle pleine lune. Les plus sceptiques imaginent plutôt « un être détraqué qui passerait ses nuits à jouer au spectre ».

« Je ne pense pas qu’il y avait des gens qui y croyaient vraiment, mais tout le monde en parlait, ça faisait causer dans les cafés », se souvient aujourd’hui Marie-Joseph Quintin, native de Plougastel-Daoulas et auteur de nombreux ouvrages sur la commune. Une rumeur qui selon Gérard Autret, 66 ans et actuel propriétaire du restaurant La Belle époque, était bien fondée. « La femme de l’ancien restaurateur s’est effectivement tuée à l’entrée du pont Albert-Louppe. C’était le 5 juillet 1977, explique-t-il en fouillant dans ses actes notariés. De mémoire, il y a eu une collision avec une remorque de tracteur. »

« Des carabins ? »

De là à croire à la dame blanche ? « Bien sûr que non, je reste persuadé que ça reste des conneries d’étudiants et de carabins… » « Y a des gamins de Keraliou (un lieu-dit à proximité du pont, ndlr) qui se déguisaient aussi pour rigoler, j’en connais quelques-uns qui le faisaient », ajoute un ancien commerçant du centre-ville.

Depuis les années 80, la dame blanche ne serait pas réapparue. « Nous n’avons pas reçu de nouveaux témoignages à ce sujet », indique-t-on à la gendarmerie pour qui le mystère plane toujours en revanche. De quoi enterrer définitivement cette légende ? Pour tous ceux qui veulent en avoir le cœur net, la prochaine nuit de pleine lune est programmée le 4 février.

 

Top 3 des épisodes de « Mystères »

Si t’as grandi dans les années 90, cette émission de TF1 sur les phénomènes paranormaux t’a sans doute empêché de t’endormir certains soirs. Flashback.

La maison qui saigne
Il s’agit du tout premier épisode. C’était le 8 juillet 1992 et les téléspectateurs découvraient une histoire bien bien ouf en Picardie. Celle d’une maison possédée qui saignait, littéralement. Des traces de sang apparaissaient sans raison sur les murs, le sol, les lits… Avant que les habitants décident de se barrer.

Les yeux des tableaux
Pierre et Carmen Tisserand sont propriétaires d’un petit hôtel. Tout se passe bien jusqu’au jour où des esprits commencent à se manifester : lampes qui s’allument toutes seules, bruits inexpliqués et, plus scary, des tableaux dont les yeux bougent (photo). Conseil : si votre gosse est pénible un jour, vengez-vous en lui montrant cet épisode.

Les pommes volantes
Alors qu’ils vivaient paisiblement dans leur maison normande, deux retraités vont être victimes d’un poltergeist. La nuit, des pas se font entendre au grenier et des meubles se déplacent. Point d’orgue : des pommes qui volent et traversent les murs. Une histoire qui inspira Sexy Sushi pour un de ses titres